Marche tout au bord de l’océan 

Marche tout au bord de l’océan

Là où se noue le choc premier, l’affrontement le plus vif

L’ancestrale confrontation de l’eau et de la terre

Marche tout au bord de l’océan où tout se joue

Où la mer croit rompre les digues

Où la rive se vante  de contenir les eaux

Marche et prends parti

 

Tu es du parti de la terre

Tu as pris le parti de l’immeuble, du solide

Du roc

Et tu résisteras

Tu résistes à la folie des vagues et du vent

Au fracas des tempêtes

Comme tu résistes à la douce caresse de l’onde

Tremblement du désir qui brode le sable blond

Tu déclines l’appel obstiné des houles callipyges

Tu restes rocher

Tu restes de granit

Où les vagues viennent briser leur ardeur exigeante

 

Tu es falaise de certitude

Et tu résistes à l’épanchement

 

 

Et toi

Toi, tu as refusé la terre

Tu as pris le parti de l’océan

Tu choisis la colère patiente

Des déferlantes et des rafales

Tu te cognes aux rochers

Projettes tes embruns

Pour assommer leur vigilance

Puis tu fais mine du renoncement

Tu choisis l’effort des vaguelettes saintes-nitouches

Et poursuis ainsi ton travail de corruption

Roulant sable et galets dans le flux et le ressac

Au jusant tu relâches la pression

Au flot tu cherches les fissures et les contournements

 

À toi l’usure du temps et les effondrements

Toujours vaincu et toujours conquérant

 

Marche tout au bord de l’océan

Pour donner de la couleur au monde

Marche et prends parti

 

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